Ils étaient Charlie

07 janvier 2025

Actualités

Ils étaient reporters-dessinateurs, chroniqueur, rédacteur-réviseur, rédacteur en chef adjoint, directeur de la rédaction. A partir de leurs dossiers de demande de carte de presse conservés dans nos archives, la CCIJP rend hommage aux confrères assassinés dans les locaux de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015.

 

 

© Archives CCIJP

Jean Cabut, dit Cabu

« Jai lintention de consacrer une part importante de mon activité pour un genre – qui nest dailleurs plus tellement prisé des journaux –, le croquis de reportage », écrit Jean Cabut dans sa déclaration sur l’honneur manuscrite à la CCIJP (Commission de la carte d’identité professionnelle des journalistes). En 1964, il obtient sa première carte d’identité de journaliste, portant le numéro 21 991, en tant que pigiste. Viscéralement journaliste, il l’a ensuite toujours renouvelée, souvent tout simplement comme « dessinateur ». Parmi ses employeurs : Le Nouveau Candide, Le Canard enchaîné, Charlie Hebdo, mais aussi Le Figaro, Pilote ou Hara-Kiri. Son pseudo, « Cabu », devient officiel sur sa carte professionnelle aussi, en 1986.

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Stéphane Charbonnier, dit Charb

De sa première à sa dernière demande de carte (n° 77 545), le parcours de Stéphane Charbonnier reflète le nouveau Charlie Hebdo, relancé en 1992. En 1995, Charb – son pseudo – y est « reporter-dessinateur » et jongle entre les formats, dont ses « carnets de voyage », qui le conduisent en France (La Réunion, Avignon) comme à l’étranger (Pologne, Israël). Il réalise également la une sur l’actu de la semaine. « Si mon projet nest pas retenu, il passe dans Les Échappés » (maison d’édition créée par Charlie), indique-t-il à la CCIJP. C’était avant de devenir rédacteur en chef adjoint, puis d’obtenir en 2010 une carte de presse « directeur » puisqu’il avait pris la tête de Charlie Hebdo l’année précédente.

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Philippe Honoré

Lorsque Philippe Honoré envoie sa première demande de carte de presse en 1975 comme « reporter-dessinateur pigiste », cet autodidacte accomplit son rêve, après des débuts dans le dessin industriel. D’année en année, la liste de ses collaborations transmise à la CCIJP s’étoffe, complétée avec minutie au feutre noir, d’une écriture aussi précise que son trait. La Nouvelle Vie ouvrière, Lire (et ses rébus littéraires)… Puis, à partir de 1992, un Charlie Hebdo tout juste relancé, alors édité par la société Kalachnikov (l’humour Charlie, à effet dramatiquement différé). Jusqu’à l’obtention de la carte honoraire, en 2002, le titulaire de la carte 36 443 aura le journal satirique comme employeur principal.

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Bernard Maris, dit Oncle Bernard

Certains ont connu Bernard Maris en écoutant France Inter. D’autres en le regardant à la télévision, entre autres sur i-Télé. Beaucoup en lisant ses chroniques dans Charlie Hebdo (dont il sera un temps directeur adjoint de la rédaction). Toutes signées de son célèbre pseudo, qu’il finit par assumer dès l’en-tête de son dernier CV transmis à la CCIJP : « Bernard Maris, dit Oncle Bernard ». Autant de facettes qui se retrouvent dans le dossier n° 97 427 de la CCIJP, confirmation que l’Oncle Bernard aura largement cherché à faire porter sa pensée critique de l’économie. Jusque sur les bancs de l’université (Paris-VIII), où le journaliste cédait alors toute la place à l’économiste.

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Mustapha Ourrad

« Je suis pigiste régulier à Charlie Hebdo. En raison de l’incendie du journal, je n’ai pas eu le bulletin de paie d’octobre, ni celui de novembre », écrit Mustapha Ourrad pour sa demande de carte de presse 2012. Des mots pudiques pour évoquer les jets de cocktail Molotov qui, dans la nuit du mardi 1er au mercredi 2 novembre 2011, ont ravagé les locaux de l’hebdomadaire satirique.
Mustapha Ourrad en est le rédacteur-réviseur. Cette fonction, il l’assure également en CDI pour le magazine de la santé Viva. La sobriété de son CV, pour sa première demande, en 2003 (carte n° 97 536), masque aussi l’ampleur de ses connaissances : qui peut corriger dictionnaires et encyclopédies ?

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Bernard Verlhac, dit Tignous

En 2003, certains préfèrent les mails. Pas Tignous. Pour obtenir une attestation d’ancienneté, il écrit à la CCIJP au feutre noir sur son papier à en-tête. Une caricature est intégrée à ses coordonnées : un peintre à béret face à un chevalet dessine la une d’un journal. En pied de page, son numéro de carte de presse (46 052) partage la ligne avec son numéro de Sécurité sociale. Bernard Verlhac a fait sa première demande de carte en 1980. Il était dessinateur pour Télérama et avait déjà choisi son pseudo, « Tignous ». Fleurus Éditions, L’Événement du jeudi, Que choisir, VSD, Antenne 2 et Charlie Hebdo ont été ses employeurs. Pour sa carte 2014, il s’y déclare « reporter-dessinateur ».

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Georges Wolinski

En 2008, puisque le formulaire le stipule, Georges Wolinski note sur sa demande de carte de journaliste honoraire : « Légion d’honneur, 27 juin 2005. » Il joint l’invitation de la présidence de la République et sa carte de visite, qu’il a ornée d’un dessin de… buste de femme nue. Une pointe de dérision qui transparaît dans plusieurs échanges entre Wolinski et la Commission de la carte. De 1967 à 1988, le dossier 24 731 inventorie pourtant sans interruption les couleurs des formulaires de renouvellement comme « reporter-dessinateur » pour Hara-Kiri, L’Humanité, Le Nouvel Observateur, Paris Match ou comme rédacteur en chef de Charlie Mensuel entre 1971 à 1980.