Myriam Juan : « Les femmes journalistes sont les grandes oubliées de l’histoire »

Maîtresse de conférences à l’université de Caen, Myriam Juan s’est plongée durant plusieurs semaines dans les archives de la CCIJP pour effectuer des recherches sur les femmes journalistes dans le milieu du cinéma avant la Seconde Guerre mondiale. Retour d’expérience.

Comment avez-vous eu connaissance des archives à la CCIJP ?

Myriam Juan. À la base, je suis historienne et je me suis spécialisée au fil des années dans l’histoire culturelle et sociale en France, plus particulièrement dans le milieu du cinéma. Au cours de mes recherches, j’ai eu accès à de nombreuses archives et lu beaucoup la presse. À la lumière de ces expériences, je me suis aperçue que les femmes journalistes étaient les grandes oubliées de l’histoire. Autant il y avait beaucoup de documentations concernant les actrices, les réalisatrices, les scénaristes et les autres femmes du cinéma, autant les informations étaient plus réduites pour les journalistes. C’est lors d’un colloque qu’un confrère m’a appris l’existence d’archives à la carte de presse et surtout qu’il y avait un dossier concernant chaque femme journaliste depuis 1935 !

 

Qu’avez-vous découvert ?

Myriam Juan. À partir de mes recherches, j’avais réussi à établir une liste de noms de femmes qui avaient été journalistes avant 1940. Pour certaines leur carrière était très documentée, mais pour d’autres je disposais de trop peu d’éléments. La consultation des dossiers m’a permis d’avoir beaucoup de renseignements sur elles. Outre les renseignements basiques, comme la date de naissance et la situation familiale, j’ai pu découvrir par exemple de quel milieu social elles étaient issues, comment elles étaient entrées dans le métier, comment elles travaillaient, pour quels journaux, à quelles associations ou quels syndicats elles étaient affiliées* et plein d’autres choses qui vont alimenter mes futurs essai et anthologie sur le sujet.

© Francis Magois

Qu’est-ce qui vous a le plus marquée lors de cette consultation ?

Myriam Juan. Après avoir consulté ces dossiers, j’ai maintenant l’impression de les connaître. J’ai pu ainsi associer un visage à un nom grâce à leur photo, découvrir leur écriture manuscrite et me plonger dans l’époque. C’était bouleversant ! C’est un trésor. Grâce à ces archives, j’ai pu mieux mesurer le cadre familial et les règles de la profession d’avant la Seconde Guerre mondiale. Mais ce qui m’a peut-être le plus impressionnée est certainement la coupe de cheveux sur les photos. À la fois très typique de l’époque, mais aussi très moderne.

* Au sortir de la guerre, lors de sa première demande, il fallait indiquer son éventuelle appartenance à un syndicat ou à une association de journalistes.